Réveil difficile ce matin. Elle a toujours du mal aux heures de ce monde. Un bail, puis son pied foule le sol, puis l'autre. Elle se lève mais manque d'équilibre. Clairement, la nuit a été difficile, vraiment. Heureusement, elle a du temps aujourd'hui, autant en profiter. Ses pas la mène vers la fenêtre qu'elle ouvre. Ses yeux cuivrés contemplent l'horizon. Un monde dévasté, désolé...puis restauré. Cela fait un moment déjà qu'elle vit ici mais, elle ne se lasse jamais de l'horizon. Une vision qui lui donne toujours un maigre espoir pour Ephraim. Voir les montagnes arides laissant leur place à la nature chaque jour. La nature... Elle va faire un tour là-bas tiens. Son sac, ses livres, ses plumes et son encre; tout est paré. Cela va lui faire du bien.

Ses pas la mène enfin vers la première forêt à l'extérieur de la ville. Des arbres, de la verdure...de l'eau. Elle n'a toujours pas l'habitude de voir autant de végétation dans un seul et même endroit. Dire que tout cela n'est qu'un avant-gout de ce que l'avenir réserve. Où aller, où se poser, elle a déjà sa petite idée. Il y a un arbre plus loin en hauteur. Pour certains, ils se ressemblent. Pour elle, chacun d'entre eux est une découverte. Et allez savoir pourquoi elle s'est prise d'affection pour ce grand arbre. Le paysage, le confort, le calme, l’atmosphère? Oui et non. Cet endroit a un je ne sais quoi de familier, presque rassurant.

Avant même d'arriver à destination, Djehuty sort son journal de son sac. La nuit passée la trouble encore. Il faut qu'elle se vide la tête, tout de suite. Son écriture est maladroite et tremblante mais ça, c'est ce qui arrive quand on écrit en marcha- ▬ Tu as tant souffert. Il est temps pour toi de ne plus avoir peur.

AH!

Un sursaut et sa plume transperce la page. Quelqu'un? Ici? Si tôt? Elle n'y pense pas, trop occupée à être sortie de sa bulle. Une silhouette, devant le grand arbre. Une femme, plus grande qu'elle et habillée comme des nomades qu'elle a déjà pu croiser à Ephraim. Avant même qu'elle ne puisse y réfléchir, la femme se tourne vers elle. Ses mains resserrent leur emprise sur son journal plaqué contre elle. Montée de stress quand la "nomade" l'observe, comme pour la décortiquer. Ses yeux cuivrés fuient dans tous les directions possibles jusqu'à croiser les siens. Le regard de l'étrangère la transperce sans la foudroyer. C'est déstabilisant, suffisamment pour que Djehuty ait le pas hésitant. Et l'étrangère s'adresse à elle...et maintenant la petite est encore plus confuse qu'avant. Djehuty penche la tête par réflexe. Ces mots, elle n'en avait compris que la moitié, et encore. Quelque-chose comme "Toi aussi regard" et c'est tout. La petite reste bouche bée quelques secondes, hésitante avant de s'élancer.

J-euh je j'ai p-pas, vo-ous parlez quo-

Elle se tait, d'un coup, les yeux grand ouvert et les joues un peu rouge. Parles-t-elle seulement la même langue?

Pard-d- Bon, autant essayer avec le plus basique, quitte à s'y casser les dents.

Be-bonjour?

Mieux que rien.

La jeune fille la regarde, elle est perdue dans son regard, sans savoir pourquoi. La femme devant elle s'avance, lentement mais sûrement. Djehuty n'a pas peur, à vrai dire c'est plutôt l'inverse. Elle n'arrive pas à l'expliquer mais, cette étrangère, il y a comme, quelque-chose de "doux". Peut-être s'agit-il juste des sables en elle qui lui donnent cette impression. Peut-être. Pourtant, après avoir passé une nuit aussi infernale que celle passée dernièrement, la rousse parait presque comme une bouée de sauvetage. Djehuty s'apprêtait à reprendre la parole mais elle a été devancée. Cette fois, elle la comprends. C'est... La petite était juste surprise et confuse mais encline à discuter. Se vider la tête. Mais non. Ces mots, ce geste, difficile à décrire.

Hu-j-je j-

Cette inconnue, elle ne l'a croisée qu'il y a quelques secondes et pourtant... Son regard, son geste, ses mots et surtout, cette sensation étrange, indescriptible. Ce contexte est si, étrange. Tout vient trop vite avec trop de justesse. Ça la transperce, comme une flèche. Comme si elle avait vu à travers elle dès le début. Djehuty, elle essaie d'être stoïque, de se tenir droite et d'aller bien. Une persona qu'elle essaie d'entretenir et pourtant, tout vient de se détruire en seulement deux phrases. Elle a déjà oublié qu'il ne s'agit que d'une bête rencontre dans la forêt. La petite essaie de répondre mais son visage pique de partout, sa gorge se serre, de l'eau brouille ses yeux et ses lèvres tremblent.

{Song of the ancients - Popola}

...

Elle n'a baissé ni la tête ni les yeux pour se cacher. Une larme s'échappe, puis une autre, vient la crise et les sanglots. Et elle reste plantée là, les yeux dans ceux de l'inconnue. C'est comme si elle retournait à la case départ, encore. Elle n'a aucune idée ce qui est entrain de lui arriver, vraiment.

Elle ne comprends pas ce qu'il se passe. Tout lui échappe complètement. C'est comme si, on avait appuyé sur le boutton pour tout déclencher. C'est à croire qu'elle ne s'est pas réveillée, qu'elle rêve encore. C'est si, surréaliste. L'indigène la prends dans ses bras et elle, sa tête s'enfonce dans cette épaule. Ses pleurs s'intensifient, elle est à son paroxysme ou, du moins, à son plus bas. S'en devient si bruyant que l'on dirait presque des cris. Elle ne voulait pas ça, vraiment. Elle pensait, dans le pire des cas, pleurer puis se ressaisir, comme à chaque fois. Cette fois non; elle n'y arrive pas, elle ne veut pas y arriver, elle ne veut plus, elle n'en peut plus. Ses nerfs craquent et ses bras serrent aussi fort que possible l'inconnue. Elle a fait un long voyage dans la tempête, très long même, et pour la première fois, elle découvre un phare. Alors elle s'y accroche, désespérément. Après tout ce temps, on lui accorde enfin du répit, ne serait-ce qu'un peu.

Et puis vient une mélodie vibrant jusque dans leur cage thoracique. Un air qui lui est inconnu et pourtant familier. Il y a un je-ne-sais-quoi de nostalgique. C'est comme si sa soeur Basmath lui chantait les berceuses, comme autrefois. elle n'était qu'une enfant à qui on chantait cela pour qu'elle puisse dormir. Aujourd'hui, on lui chantonne cet air pour qu'elle puisse reposer son coeur, comme une enfant. Une enfant oui, rien n'a changé on dirait. Pourtant, exceptionnellement, elle laisse couler. Sur l'instant, elle n'a plus la force d'être adulte, et seule. Seule, elle ne l'est pourtant plus, pour l'instant. Il y a comme un feu doux qui réchauffe sa poitrine. Elle tremble de moins en moins, les dernières larmes coulent et la gorge relâche son emprise. Seuls les sanglots restent, toujours irréguliers. Elle ne bouge pas, pas encore. Elle veut rester avec elle, juste un peu avant de redevenir une adulte.

Sa respiration commence à redevenir normale et sa voix se calme. Seuls ses yeux secs lui paraissent douloureux maintenant. Elle retrouve finalement le courage de sortir sa tête.

J-j-mer-m-sans v-v- Et puis son regard se plonge sur le visage de la "sauveuse".  Elle voit des larmes. Elle ne sait pas ce qu'il se passe, elle ne comprends pas. Pourtant, il y a quelque-chose qui la touche, viscéralement.

Sa passivité s'efface au profit d'une énergie renouvelée. Ses yeux cuivrés, de nouveaux vifs, fixent les paupières fermées de l'inconnu d'où s'échappent les larmes. Une de ses mains se lève et, maladroitement mais doucement, elle essuie les joues de sa sauveuse. Djehuty est retournée à ses habitudes. C'est elle qui a eu besoin d'être aidée et maintenant c'est elle qui souhaite aider. Ses cordes vocales trouvent même la force de lui parler.

C-ça va aller...

Ses yeux grand ouverts trahissent une inquiétude nouvelle, pas pour elle mais pour cette... et elle ne sait même pas son nom.

C'est vraiment, étrange. Tout est arrivé si vite. L'inconnue, elle n'a pas l'air de bien parler la langue et pourtant... Et la façon dont la petite a réagit, non, comment toutes deux ont réagit. C'est comme si les normes sociétales s'étaient évaporés au profit de l'instinct. En une poignée de mots, tout ce que Djehuty avait intériorisé depuis l'incident, tout a explosé en larmes. Les yeux asséchés, son esprit s'est éclaircit. L'inconnue aussi laissait s'échapper ce "quelque-chose", avec beaucoup plus de retenue (ou de maturité). La petite s'est voulue rassurante, elle a essayé. L'inconnue elle, elle lui a suffit d'un seul regard, d'un simple hochement de tête pour inverser les rôles, encore. Djehuty voulait rassurer, mais c'est surtout elle qui continue d'être réconfortée. Elle lui fait même signe pour aller vers l'arbre. Le visage de la gamine passe de l'inquiète à un air "étonnée", yeux grand ouvert, bouche bée.

Huh?

Elle prends quelques secondes avant de comprendre ce qu'on essaie de lui dire. Elle a bien entendu le "viens" mais, huh, tête en l'air.

Oh! Eh-j-oui.

Et réalise aussi qu'elle ne s'est toujours pas détaché de sa "comparse". Coup d'oeil sur ses bras, un droite à gauche vif de la tête et elle s'extirpe avec une maladresse un peu brusque.

P-pardon!

Elle baisse la tête quelques secondes avant de suivre l'étrangère...avant de se retourner d'un coup. Ses affaires, elles les avaient laissés tombés sans s'en rendre compte, ça et son chapeau. Djehuty récupère tout à la va-vite et revient vers l'arbre en trottant. Et la voilà qui se pose enfin à coté de l'inconnue. Ses livres sur le coté, la plume sur les livres et la coiffe au sommet. Avec son manteau, on dirait presque un tipi. Elle expire un grand coup. Sa respiration est enfin revenue à la normale. De même, elle s'essuie les yeux puis les joues. Ses pupilles contemplent la forêt renaissante. Un moment de tranquillité, enfin. Sans parler de celle qui se tient à ses cotés. Elle ne saurait dire pourquoi mais, elle dégage quelque chose de réconfortant. Comme si elle avait l'air forte, plus forte qu'elle en tout cas. Un peu comme Deborah. Ses mains ont arrêtés de trembler. Mieux, il y a un sourire, à la fois heureux et nerveux. Et puis ses pensées fusent à nouveau, en se rappelant d'un détail tout bête.

Hum...

Elle tourne les yeux vers l'inconnue avant de placer sa main sur le sternum. Pour la première fois depuis ce matin, son geste est calme, serein même. Il faut juste qu'elle trouve comment le dire. Cette femme, elle n'a pas l'air de comprendre ses mots, pas complètement. Elle lève son index pour pointer sa propre personne et

Djeh-...

Ses mots s'arrêtent net.

Judith.

Elle l'aime bien cette étrangère, vraiment. Il n'y a pas vraiment de raisons logique à cela. Elles se sont rencontrées il y a tout juste quelques minutes après tout. Mais hey, jusqu'ici, rien ne s'est basé sur la logique. Tout ce qu'elles ont toute deux fait, c'est écouter leur coeur. Il faut croire que cela a suffit pour passer outre la barrière de la langue. Et puis, allez savoir, il y a juste ce "feeling". Djehuty lui fait déjà confiance. Elle dégage quelque-chose de naturel, de "bien". Elle est naïve la petite, mais quelque-chose lui dit que son instinct a raison cette fois. En réponse à la réponse doublé d'un sourire de sa comparse, ses yeux s'illuminent et son sourire se fait rayonnant. Elle a un peu la réaction d'une enfant mais, après tout ce long voyage, c'est normal. Elle voulait connaitre le nom de sa "sauveuse", le voilà.

Tek-o... Elle fronce les sourcils, légèrement frustrée. Elle ne veut pas massacrer son nom. Elle mérite des efforts. Alors Judith inspire profondément, yeux fermés.

Tekonwenaharake. Elle l'a dit, sans bégayer, sans hésiter. Ça y est, elle commence enfin à parler normalement ! Son sourire éclate en rire de joie.

La dernière fois qu'elle y était parvenu, c'était durant sa toute dernière nuit avec Deborah. Ses yeux s'humidifient à nouveau sans pour autant verser de larmes. Elle est juste, heureuse d'enfin réussir à se sentir bien. Elle n'avait même pas remarqué que Tékon marmonnait son nom. Pas de Djehuty non, son vrai nom. Lui dire qui elle était vraiment, c'était la moindre des choses. Et maintenant elle demande la signification derrière. Une simple question qui déclenche un élan d'enthousiasme chez Djehuty. Elle place ses deux mains comme pour une prière et embarque pour un monologue.

Judith c'est un prénom dérivé de mon nom de famille Yehudit. Yehudit qui était la version pseudo-archaïque d'une sous branche seraphin dite "Judaïque". Si on le traduit sous sa forme brut on peut obtenir félici-... Son sourire se change en grimace et une goutte de sueur coule sur le front. Bouche bée, elle ne réalise que maintenant que Tékon ne maîtrise pas vraiment sa langue. Ses mains se détache mais elles s'emmêle les doigts nerveusement. Elle baisse rapidement la tête avant de croiser du regard Tékon.

La félicitée.

Corrige-t-elle avant de rire nerveusement en se grattant la nuque puis le nez. Elle aimerait dire que c'est sacrément ironique comme nom vu sa situation mais...une chose à la fois. Ses yeux se fixe alors sur sa comparse, non sans un air candide.

Et toi?

"Tu es joie", des mots tout simple mais qui déclenchent un je-ne-sais-quoi chez Judith. Comme une brève mais intense réflexion sur son véritable nom. "Félicité", qui lui a donné ce prénom? La Torah? Basmâth? Les parents qu'elle n'a jamais connu?  Ses parents, ils l'aimaient? ...Peu importe qui le lui a donné. Judith c'est un nom pour la joie. Sa soeur lui a toujours dis que c'était l'émotion qui lui allait le mieux. Pas toujours celle qu'elle affiche le plus, mais celle dont on garde les meilleurs souvenirs. En tout cas, c'est qu'elle aime se dire. Se dire que c'est cette facette d'elle-même qui a aidé Deborah. Tout cela, elle l'avait presque oublié. Trop d'angoisse, trop de peur, trop de trop. Sa joie elle l'avait perdue mais Tékon lui a permit de la retrouver. Ça fait du bien de se reconnecter avec soi-même, vraiment. De quoi la faire sourire et même rire sincèrement lorsque la chaman lui dit cela. Toute un torrent de pensées dans son esprit. Esprit qui se retrouve extirpée de sa bulle lorsque Tékon reprends la parole. Les yeux cuivrés s'écarquillent alors qu'elle répètent les mots.

Percer, vent...voix? ...OH ! La voix qui perce le vent !

S'exclame-t-elle d'un air enthousiaste, les étoiles plein les yeux. La voix qui perce le vent, c'est tellement approprié. Surtout pour elle. Ses mots qui sont passés à travers sa fragile carapace.

{Farthest land - SOTC}

C'est drôle... Dit-elle en tendant sa main dans l'air. Air qui se condense dans le creux de sa main.

Ce même air qu'elle maintient avant de doucement guider le vent toujours plus haut. L'air se meut comme dans un bal au milieu des branches. Branches qui se meuvent, laissant apparaître la lumière du soleil. Voilà maintenant que les les lieux baignent dans la lumière du soleil. L'endroit parait maintenant comme une clairière. Tout parait plus, coloré, harmonieux.

Moi, peuple du vent. En laissant son regard contempler le sommet des arbres. Ton nom, j'aime bien. avec un sourire chaleureux, sans pour autant quitter du regard le ciel.

Et puis c'est de nouveau le flux de pensées incessante. Parmi elles, l'une vient agripper à l'instant présent. Sa tête se tourne vers l'indigène; non sans un air interrogé.

Et toi? Elle aurait aimé lui poser bien plus de questions. Après tout, elle ne parle pas bien la langue, ses habits sont exotiques et sa façon d'être la déconcerte, en bien. Djehuty est mystérieuse, mais elle, elle la trouve plus intrigante encore.

Les rôles s'inversent, maintenant c'est Judith qui écoute, observe et tente de comprendre. Honnêtement, entre les gestes, les termes exotiques et son choix de mots qui lui semble ardu, la petite a du mal. La ville pointée puis la pointe en silex de la flèche. Grandes maisons? Peuple? Petit peuple et silex? La jeune fille a du mal à saisir ce que Tékon essaie de dire. Elle lève les yeux au ciel, l'index sur ses lèvres comme un tic tant qu'elle est plongée dans sa déduction. Allez savoir pourquoi, elle a du mal à voir le rapport avec le silex...pendant quelques secondes. Elle comprends enfin, ouvre grands les yeux, tape dans ses mains, le tout ponctué d'un

Ah mais oui!

Evidemment c'était évident. Les grandes maisons, le petit peuple avec le silex. Elle compare forcément la façon de vivre, les coutumes et le niveau technologique qui sépare les deux. Mais, est-ce que cela veut-il dire que son monde d'origine comportait une civilisation dite "moderne" et une autre plus "primitive"? En un sens, ce fut un peu le cas pour le monde de Judith. La différence étant que le peuple plus avancé n'est plus depuis longtemps. Reste juste à le dire avec un vocabulaire compréhensible. Judith se sent presque méchante à contenir sa verve pour se mettre à son niveau. Ce n'est pas leur faute pourtant. Sans parler des langues qu'elle et le reste de la Torah ont déjà déchiffrés par le passé.

Toi, petit peuple? Silex toi, eux fer? Deux peuples, même monde? Sait-elle seulement ce qu'est le fer? Il serait délicat de lui poser la question.

En fait, elles n'arriveront pas à grand chose dans cet état. Ses sourcils se froncent et ses doigts se posent à nouveau sur les lèvres.

Hmmm...

Je me demandais... Toi? Parler quelles langues? Et la voilà à faire mine de parler avec sa main de façon assez gênante. Ce qu'on ferait pas dans l'espoir de se faire comprendre.

Toi parler comme moi, mais parler aussi comme qui? Finit-elle en se grattant la nuque, le nez et l'arrière du crâne. C'est un peu embarrassant de devoir s'expliquer de façon aussi...enfantine? La discussion risque d'être plus compliqué que prévu, sauf si....

Le poids de sa main se pose sur son épaule mais, ironiquement, Judith se sent déjà plus légère. Les yeux grand ouvert, la petite fixe Tékon et l'écoute attentivement, comme en plein cours.

"Kanien’kéha kah:ronka"

Donc ça, de toute évidence, c'est sa langue natale. C'est vraiment exotique tiens. Pas sûr que Judith connaisse une autre langue à la sonorité similaire. A vrai dire, elle n'est même pas capable de distinguer les espaces ou le nombre de mots prononcés. Elle devrai l'étudier aussi tiens ! ...La langue, pas Tékon, enfin si, mais, huh, vous avez compris.  Et puis-

"Je... Je parle aussi français."

Là tout de suite, la mine de Judith s'éclaircit d'un coup. Mais oui, elle reconnait cette langue ! C'est celle de Beast's castle et de la cité des cloches ! Elle l'a déjà étudié plus d'une fois. Elle n'est encore jamais allé dans l'un de ces deux mondes mais, allez savoir pourquoi, elle adore la langue...et la culture...et la cuisine...et la littérature...et je vais pas faire la suite car vous avez compris. Souriante et tapant une fois dans ses mains pour les garder attachées elle s'exclame...en français.

"Oui ! Je juste commencer à apprenez le france ! Je beaucoup aimer le France!" Qu'elle ponctue d'un petit rire. Pour une fois qu'elle a l'occasion de mettre son savoir en pratique.

Son accent français était quasi-parfait. Pour le reste on accorde une minute de silence aux profs de français qui lisent ce post. Judith n'a pas besoin d'observer l'indigène pour deviner qu'elle est, et bien, indigène. Elle pose son index devant sa bouche, fronce les sourcils et penche la tête, curieuse mais surtout pensive. D'où vient-elle? Que fait-elle ici? Pourquoi à l'écart? Pourquoi ces deux langues? Ect, ect...

"Tu pas venir de "La cité des cloches" ni du le château..." Son regard se perds ailleurs avant de revenir sur l'indigène.

"Tu pas venir ici non plus... Tu être arrivée quand?" Elle hésite, elle sait qu'elle va devoir aborder le sujet qui fâche. Elle se donne malgré tout du temps, celui de trouver les mots et une formulation "correcte". "Est-ce que...Monde, être détruire?"

Elle la regarde, avec toute son attention et sa concentration. Pour sûr, c'est évident qu'elle vient d'arriver récemment. Tous ceux qui arrivent ont, d'ordinaire, perdu leur monde. Cela ne semble pourtant pas être son cas. Elle parle ensuite d'etre "prisonnière dans les étoiles". Les deux dernières phrases de Tékon l'intriguent. Clairement elle se retient de faire des phrases plus complexes ce qui, honnêtement, arrange Judith. Si elle comprends le français, l'accent de sa comparse complique les choses. Est-ce que...est-ce qu'elle fait mention d'une abduction? Quelques personnes au sein du RGPC ont déjà parler de ce genre d'incidents. Cependant, ces problèmes là sont réglés par un gouvernement bien à part. Judith n'a pas vécu son histoire et pourtant... Il y a ce quelque-chose, qui fait qu'elle comprends et ressent. Elle n'imagine que trop bien ce que cela doit faire d'être retirée de force. Une espèce de peine, de vide mais aussi de frustration. Comme si elle ressentait vaguement ce que elle, Tékon, ressentait. L'empathie de la petite qui a raison d'elle, encore.

Judith l'évite du regard, regard qui se baisse, la mine attristé.

Je...

Et elle réalise que sa nouvelle amie amérindienne n'a sûrement aucun toit sous lequel dormir. En réalité, elle s'en rends enfin compte. Elles sont toutes deux seules et livrées à elles-même. Était-ce pour cela que tout est allé si vite? Sans un mot? Sûrement. L'une comme l'autre semblent êtres des personnes basées avant tout sur le ressenti et non la raison pure. En parlant de raison, la petite reste là, le regard perdu, pensive. Et puis, elle écarquille légèrement les yeux qu'elle dirige vers l'étrangère qui ne l'est plus. Elle reste bouche entre-ouverte, comme un laps avant de trouver les mots, les phrases.

Je sais pas si je pouvoir aider. Cependant, Merlin, il oui ! Merlin mage sage, puissant, sava-OH ! Elle re-tape dans ses mains. Il peut donner agil-abilité parler toute les langues !

Elle commence à reprendre ses affaires, déjà prête à se lever. C'est qu'elle est déjà partie du principe qu'elle va l'emmener à Merlin tout de suite.

Et si tu as du besoin de toit. Je ais maison, tu peux venir ! Ce me faire plaisir !

Décidément, ces deux-là sont en pleine montagnes russes émotionnelles. Elles ont commencés par le fond du trou puis elles ont remontés pour replonger, et au final, les voilà qui rebondissent une fois de plus. Il faut croire qu'il y a toujours de la chance dans la malchance. Après tout, si ce n'était pas le cas, elles ne se seraient jamais rencontrés. Mais alors que la petite s'apprête à se lever, affaires en main, elle sent sa main se poser sur son épaule. Sans surprise, elle se retourne, l'air interrogé.

"Ton cœur est rempli de compassion, Son regard se pose sur l’Éternité."

Judith reste une ou deux secondes un peu bouche bée. Elle ne s'attendait pas vraiment à entendre quelque chose de bien, enfin pas dans ce sens là. Un spasme comme un spectre de sourire puis rire nerveux et s'en vient un sourire, un vrai cette fois. Les joues se sont légèrement empourprés aussi. Toujours souriante, elle fait mine de hausser les épaules. Lui vient d'un coup un élan d'énergie. Elle se lève d'une traite puis attrape le bras de Tékon. Qui aurait cru qu'elle aurait commencé la journée morte dans l'âme et maintenant pleine à rebord d'énergie?

Allez viens ! On viens voir Merlin, tu parles langue puis je montrer chez moi.

Elle hoche la tête vers la grande rousse, toujours avec cet entrain qui lui parait presque aliéné.

Tu as l'air fatigue. Plus que moi.

Qui plus est, c'est le matin. Elles ont toutes les chances de trouver le vieil enchanteur chez lui. Aucun problème ne peut arriver en cours de route, hein? Pas vrai? On est pas malchanceuses à ce point si? (Si)

Et les voilà embarquées d'elles-même toutes les deux vers la ville. Elle avance Judith, confiante, enjouée et enfin heureuse qu'il puisse lui arriver quelque-chose de bien ces derniers jours. Elle entends les mots de Tékon. Des mots expirés avec moins d'énergie qu'au début on dirait. La petite se retourne et la regarde, avec un air un peu plus sérieux. Puis elle tente maladroitement de sourire et hoche la tête. Quand on sait pas utiliser les mots... Et elle continuent la marche. Petit à petit, l'herbe laisse place à la pierre et les arbres vivent au milieu des bâtisses. Le soleil levé commence déjà à réchauffer le sol minéral. Ça, les pieds nus de Judith le sentent très bien.

Les habitants aussi sont levés. Ils ouvrent portes et fenêtres et les travailleurs se rassemblent au lieu de travail. La ville ne se reconstruira pas toute seule. Maintenant qu'elle les observe, la blonde commence à se demander si leur arrivée ici était vraiment le fruit du hasard. Un monde détruit qui tente de se reconstruire petit à petit. Cela lui rappelle quelque-chose... Et puis elle brise le silence, histoire de...de voilà en fait.

Tout détruit avant. Maintenant ils refont tout.

Ouai nan faut vraiment que Merlin règle cette histoire de barrière des langues. Elle pointe vers la rue sur la gauche, une intersection.

Merlin juste après !

Dis-t-elle toute sourire. Cette fois, elle commence à tirer légèrement l'étrangère d'un pas pressé. Tout ira mieux apr-

A-AH !
KUPO !

Entrée en collision du duo et d'un mog avec beaucoup trop de barda sur lui. Mais ça, c'est rien d'important. Ce n'est sûrement pas un retournement de situation de dernière minute pour mener à une autre intrigue déjà écrite pour encore plus malmener les deux... Aaah à qui on va faire croire ça...